Dénoncés par le patronat comme un frein à l’embauche, les seuils sociaux vont être gelés pendant trois ans, à titre expérimental, a annoncé le ministre du Travail François Rebsamen.
Pour les organisations patronales, les seuils d’effectifs sont l’une des plaies du droit social. Depuis des années, le Medef et la CGPME dénoncent ces cinq planchers réglementaires (10, 11, 20, 25 et 50 salariés) dont découlent de nombreuses obligations administratives et fiscales auxquels de nombreuses entreprises préfèreraient se soustraire, quitte à bloquer leurs embauches.
Un exemple : une entreprise de neuf salariés ne sera pas soumise à la taxe transport et aura la possibilité de verser ses cotisations une fois par trimestre. Si cette même entreprise passe à 10 salariés, l’aide au transport lui sera réclamée par le trésor public, le paiement de l’Urssaf interviendra chaque mois et son taux de cotisation pour la formation sera revalorisé. A onze salariés, elle devra procéder à l’élection d’un délégué du personnel.
Une mesure favorable à l’emploi ?
A partir de 20 salariés, s’ajoute aux charges fixes la cotisation au Fond national d’Aide au Logement et une contribution à l’effort de construction. Lorsque le cap des 50 salariés est franchi, l’entreprise a l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise, d’installer un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et de former ses membres.
Une contrainte qui explique, selon la CGPME, le fait qu’il y ait aujourd’hui, en France, « 2,4 fois plus d’entreprises de 49 que de 51 salariés ».
Pour lever ce frein présumé, le ministre du Travail François Rebsamen a annoncé un gel de trois ans des seuils sociaux. En clair, cela signifie que leur enclenchement sera suspendu pendant cette période, ce qui permettra aux entreprises concernées de franchir les seuils fatidiques sans avoir à répondre à de nouvelles réglementations sociales et fiscales : « Si cela crée de l’emploi, tant mieux, sinon, on remettra les seuils en vigueur et on n’entendra plus l’argument patronal » a assuré le ministre.
Le délai de trois ans n’est pas un complet hasard et ne constitue pas, en soi, une révolution. Actuellement, la loi stipule, par exemple, que le seuil des 50 salariés soit pris en compte dès lors qu’il est dépassé « pendant douze mois au cours des trois dernières années ». Si ces conditions ne sont pas remplies, l’entreprise passe entre les mailles du filet.
En 2008, Nicolas Sarkozy avait fait passer dans la loi de modernisation de l’Economie un certain nombre d’allégements qui visaient, là aussi à titre expérimental, à étaler dans le temps les effets du franchissement des seuils : la progression du taux de cotisation était ainsi lissée sur six ans, la cotisation d’aide au logement gelée pendant trois ans, et la dispense de paiement de la taxe transport prolongée lorsque le franchissement des 10 salariés résultait d’une reprise d’entreprise.