Pierre Gattaz compare le programme économique du Front National à « l’expérience malheureuse » tentée par François Mitterrand en 1981. Parallèle osé ou justifié ?
Alors que le FN caracole dans certains sondages préfigurant les résultats des prochaines élections régionales (6 et 13 décembre), notamment en Nord/Pas-de-Calais/ Picardie et Provence-Alpes Côte d’Azur où la famille Le Pen est donnée gagnante, certaines voix commencent à s’élever, localement et nationalement, pour faire barrage à la vague frontiste qui s’annonce en France, et notamment dans les territoires les plus touchés par la crise. Dans un France secouée par les attentats terroristes du 13 novembre survenus à Paris, le curseur du débat politique s’est vite déplacé des enjeux économiques vers les problématiques ultra-sécuritaires.
Lundi, c’est le journal La Voix du Nord qui a clairement pris position dans la campagne en titrant « Pourquoi la victoire du FN nous inquiète ». Mardi, c’est Pierre Gattaz, numéro 1 du Medef, qui tente de contrer Marine Le Pen et sa nièce sur le terrain économique, comparant le projet de l’extrême doute à celui du « programme commun » négocié par François Mitterrand avec les communistes en 1972, et mis en pratique à partir de 1981 : « Mélenchon-Le Pen, même combat » lance Pierre Gattaz dans les colonnes du journal Le Parisien.
Contrairement au président socialiste, Marine Le Pen ne prône pas de nationalisations, ni une hausse du Smic. Plus précisément, elle évoque une revalorisation automatique des bas salaires, financée par une taxe sur certaines importations, système qui présuppose un rétablissement des frontières. Il est vrai en revanche qu’elle plaide pour un retour progressif de la retraite à 60 ans et la sortie de l’euro : «c’est exactement l’inverse de ce qu’il faut faire pour relancer la croissance économique du pays. L’économie a besoin de pragmatisme, de lucidité » souligne Pierre Gattaz. « En 1981, cette politique nous a mis dans le mur pendant deux ans. Ne recommençons pas » ajoute-t-il.
Il y a 35 ans, la principale erreur de François Mitterrand fut d’avoir mal évalué les conséquences d’une relance par le pouvoir d’achat : la hausse du SMIC et des prestations, coûteuses pour les employeurs, avait certes permis aux plus modestes de consommer davantage, mais l’euphorie avait davantage profité aux entreprises étrangères et finalement déséquilibré la balance commerciale, plombée par une forte hausse des importations, notamment en provenance d’Allemagne et du Japon. A l’époque, la France disposait de sa propre monnaie, mais était pénalisée par la flambée du cours du dollar qui renchérissait le coût des matières premières indexé sur le billet vert. Désordre monétaire auquel s’était ajouté une fuite des capitaux consécutive à la victoire de la gauche, qui laissait craindre la mise en place d’une politique anti-libérale, voire socialisante défavorable aux entrepreneurs et aux investisseurs.