Est-ce l’effet négatif des manifestations et des blocages qu’elle provoque ou la conséquence d’une mauvaise lecture qui sème le doute dans l’esprit des français ?
Que pensent véritablement les français de la Loi Travail ? Difficile à dire tant le texte suscite les passions les plus contradictoires, à droite comme à gauche. Les divergences qui traversent chacun des camps ajoutent encore à la confusion : la gauche gouvernementale défend un texte très largement remanié sous la pression de la CFDT, loin des aspirations initiales du Medef. La gauche frondeuse se range plutôt du côté des syndicats durs qui dénoncent l’orientation ultra-libérale de la réforme. A droite, la majorité des candidats à la primaire épousent, sans prononcer le nom, une ligne thatchérienne et promettent, à ce titre, de repartir sur des bases plus audacieuses en cas de retour aux affaires en 2017.
Temps de travail négocié dans l’entreprise
Et les français dans tout ça ? Dans un sondage Harris Interactive relayé dimanche par la Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale, 67% d’entre eux se disent hostiles au projet de loi de Travail (36% sont « tout à fait opposés » et 31 % « plutôt opposés »). Ce désaccord assez net reflète-t-elle l’inquiétude suscitée par les désordres perpétrés en marge des manifestations qui réclament depuis trois mois le retrait pur et simple du texte, adopté en force en force le mois dernier au moyen de la procédure 49.3 ?
Le sondage semble aussi mettre en évidence une mauvaise communication autour du projet et une pédagogie défaillante de la part de ses défenseurs : si 45% des Français se disent « bien informés » du contenu de la réforme, 40% affirment en être « plutôt mal informés » et 14% « très mal informés ».
Le plus étonnant, c’est que les français semblent adhérer dans leur majorité à la philosophie générale du texte : 61% des sondés pensent ainsi que les conditions de travail devraient être négociées en priorité au sein de chaque entreprise ; or, c’est justement ce que propose l’article 2 de la Loi El Khomri, passage le plus contesté par la CGT qui dénonce une inversion de la hiérarchie des normes dans la dialogue social. Si le projet passe tel quel, l’accord d’entreprise primera sur la convention collective, notamment en matière de temps de travail et de niveau de rémunération des heures supplémentaires.